Octobre rouge, il est temps !
Voilà, c’est fait, le Sénat a voté la réforme vendredi soir, au lendemain de la procédure de « vote unique » réclamée par le gouvernement : Article du Monde
La « démocratie », parlons en …
Sarkosus minimus déclarait, lors de la rencontre Femmes et Egalité des Chances, en avril 2007 : « Le droit à la retraite à 60 ans doit demeurer »...
Pour le candidat Sarko, à l’époque, il n’était pas question de revenir sur la retraite à 60 ans. Il ne peut donc pas s’appuyer aujourd’hui sur une « légitimité » qui lui aurait été accordée par le peuple.
Rappelez vous, la « retraite à 60 ans », c’était en 1981, et c’était une promesse de campagne de François Mitterrand… En clair, la clique sarkozyste s’assoit sur le suffrage universel, et on en arrive tout doucement à une dérive dictatoriale.
Et quand il n’y a plus de légitimité, que reste t-il ? La force. On le constate, les violences policières se multiplient ces derniers jours… Contre les jeunes, contre les bougnoules, contre les salariés, contre ce machin ringard qu’on appelle le droit de grève. Tu bosses, et tu fermes ta gueule. Liberté, égalité, fraternité … Ces vieilles valeurs usées.
Témoignages sur les violences policières, Lyon,21 octobre
La réquisition de la raffinerie de Grandpuits, en Seine et Marne,21 octobre 2010
L’allongement de l’espérance de vie, parlons-en …
Sarkosus minimus change de discours, le 15 juin 2010, devant les patrons des PME : « Si l’on vit plus longtemps, on doit travailler plus longtemps, ce n’est pas un choix idéologique, ce n’est pas un choix dogmatique, c’est une question de responsabilité »…
Pourtant, selon les chiffres de l’Institut National des Etudes Démographiques, l’espérance de vie « en bonne santé » des ouvriers français est inférieure de 10 ans (59 ans) à celle des cadres (69 ans)…
La pire « réforme » d’Europe, eh oui…
La « réforme » Sarkozy-Woerth est l’une des seules en Europe qui recule à la fois les âges de la retraite (âge de départ et âge pour le taux plein) et allonge la durée de cotisation. Et c’est en France que le rythme de relèvement des seuils d’âge est le plus rapide (4 mois par an de recul de l’âge contre 1,3 en Allemagne, et 2 en Grande-Bretagne).
Car la situation des autres européens est meilleure que la nôtre : 35 annuités en Allemagne, 35 également en Italie et en Espagne, et 67 ans, oui, mais … en 2029 … !
Oui, mais il y a le « choc » démographique …
C’est « inéluctable », qu’ils disent, en nous serinant à longueur de jités la « propagande gouvernementale » : en 2000, il y avait 4 retraités pour 10 actifs, en 2050, il y aura 7 retraités pour 10 actifs…
Pour les économistes dignes de ce nom, ces chiffres ne signifient rien… Car le seul rapport qui ait un sens, c’est le rapport entre « actifs occupés » (ceux qui bossent, en clair) et les « inactifs » …
Mais justement, les « inactifs », qui sont ils ? Ce ne sont pas seulement les retraités, loin de là …
- Ce sont aussi les jeunes, de moins de vingt an (dont le nombre est en constante diminution, eh oui, la France vieillit) … En clair, tous ceux qui ne bossent pas encore.
- Ce sont aussi les chômeurs, ceux qui font partie de la tranche d’âge entre 20 et 59 ans… Et parmi cette tranche d’âge, le taux « d’actifs » n’est que de 76 %…
Le ratio inoccupés / occupés était de 1,62 en 1995, il devrait se situer en 2040 entre 1,66 à 1,79 selon les projections de l’INSEE en matière de chômage, la baisse du poids des enfants et des jeunes (qui coûtent aussi cher en dépenses publiques et privées que les retraités) devant normalement compenser la hausse du nombre de retraités.
Voir mon précédent article ici…
Bref, le « choc démographique » a bon dos… Il repose en fait sur l’idée que la « productivité » n’augmentera pas d’ici 2050… La productivité va bel et bien augmenter, mais le gouvernement a décidé que cette richesse irait directement dans la poche des actionnaires, évidemment. Les petits copains du petit chef se frottent les mains.
La croissance du poids des pensions dans le PIB, parlons-en …
Au cours des 50 dernières années, les pensions de retraite ont augmenté, elles sont passées de 5 à 13% du PIB… Au cours des 50 prochaines années, elles devraient passer (selon les prévisions de l’INSEE) de 13 à 18%. Entre 1950 à 2000, le coût des pensions de retraite a été multiplié par 2,6. Il ne devrait progresser que de 1,4 seulement d’ici 2050 (toujours selon l’INSEE).
Normalement, il devrait donc être plus facile de payer nos futures pensions. En effet, le fameux PIB double de volume tous les 40 à 50 ans. Aujourd’hui, en France, notre PIB est de 2 000 milliards, dont 260 (13%) pour les pensions, reste donc 1 740 milliards pour les actifs, les investissements (et le profit parti en fumée dans les opérations financières, hahaha).
Dans 50 ans, le PIB sera de 4 000 milliards, et les gros 20% de pensions laisseront 3 200 milliards aux actifs et à l’investissement, sachant que la population ne va pas doubler pendant cette période.
Bref, on pourrait largement payer les retraites, même si on partait tous à 60 ans, et sans décote…
Si l’on reprend les données du Conseil d’orientation des retraites dans son rapport de 2001, il suffit d’augmenter le taux de cotisation patronale de 0,37 points par an, soit en moyenne le quart du taux de croissance.
Et l’emploi, alors, on n’en cause pas ?
Le chiffre « officiel » c’est 2,7 millions de chômeurs. Mais comme vous le savez, ce chiffre est partiel, car seule la catégorie A (ne pas avoir travaillé du tout au cours du mois) est prise en compte. Mais si on compte les catégories B et C (ceux qui ont bossé moins de 78h dans le mois), on arrive à 3,97 millions de chômeurs. Si l’on rajoute les catégories D et E (ceux qui ne sont pas tenus de faire des « actes positifs de recherche d’emploi », pour diverses raisons : stage, formation, maladie, emploi aidé, etc.), on en arrive à 4,5 millions de chômeurs. On peut rajouter les 1,3 millions de RSA, qui pour la plupart ne sont pas inscrits à l’ANPE, les vieux de plus de 55 ans, les quatre départements d’outre-mer, et on arrive joyeusement à 6 millions de chômeurs, ou de personnes sous-employées.
Et 6 millions de chômeurs, c’est 25% de la population active…
Les vieux : 6 sur 10 des plus de 55 ans sont hors emploi à l’heure de la retraite. Et ça ne s’arrange pas, en un an, le taux de chômage chez les « vieux » de plus de 50 ans a augmenté de + 21%.
Les jeunes : 25 % des 16-24 ans sont au chômage.
Si les vieux s’accrochent au boulot jusqu’à 62 – 67 ans, concrètement, d’ici 2016, c’est carrément un million d’emplois qui ne seront plus disponibles pour les jeunes arrivant sur le marché du travail … Tout ça, plus la suppression de 300 000 emplois dans la fonction publique.
Mais dans la « réforme », sur l’emploi, pas un mot… Alors, d’après le gouvernement, la réforme va nous faire faire des « économies »… 1,2 milliards à l’horizon 2015, paraît-il… Or, 100 000 emplois créés, c’est 1,5 milliards de recettes pour la sécurité sociale. Rappel : le passage aux 35 heures a permis la création de 400 000 emplois. Oui, mais horreur, les 35 heures sont responsables de tous les maux… Même du réchauffement climatique, si ça se trouve.
Le message est très clair : les jeunes et les vieux coutent cher à rien foutre, les salariés eux aussi coutent cher à bosser…
La France, pays riche dont la richesse est injustement partagée
1 800 milliards, c’est la somme des richesses produites par le travail en 2009. Les salaires représentent 68% de ce gâteau. En 1982, ce pourcentage s’établissait à 76%… En fait, la part du gâteau réservée aux salariés baisse depuis… 1981. Merci aux gouvernements « de gauche »…
Pendant ce temps, la part de richesses revenant aux actionnaires a littéralement explosé (5% des profits en 1985 / 25% en 2010, selon le rapport Cotis de l’INSEE).
Selon les données de l’OCDE publiées jusqu’en 1998 dans les Perspectives Économiques, si la rentabilité du capital en France est nettement inférieure à celle constatée aux États-Unis, le taux de marge (c’est à dire la part de la rémunération du capital dans la valeur ajoutée) aurait atteint un niveau record en France.
La part des salaires dans la valeur ajoutée a certes connu une augmentation durant les années 1970, passant de 70 % à 74 %, puis un effondrement dans les années 1980 et les années 1990 pour descendre à 60 % à la fin de la dernière décennie. Ces résultats montrent une volatilité puis une déformation durable du partage de la valeur ajoutée en France ; il ne s’agirait pas d’un retour à la normale après l’absorption des chocs pétroliers mais bien d’un changement structurel en défaveur du travail.
Partage de la valeur ajoutée et rentabilité du capital en France : une réévaluation
Source Philippe Askenazy (CNRS)
La part des salaires est ombée en vingt ans de 66% à 56%, suite au déferlement bien connu de l’ultralibéralisme à partir de 1981.
La majorité des experts estiment qu’aux Etats-Unis et au Royaume-Uni, la part dévolue aux salariés est plus élevée et plus stable qu’en France. Et la baisse s’est produite en France à partir de 1983 et de 1989, alors que la gauche était au pouvoir…
Source IFRAP
La part des revenus du travail en Europe depuis 1975
Et la réforme des retraites enfonce encore un peu plus le clou : 85% de l’effort de financement des retraites est demandé aux salariés.
La voie royale pour les fonds de pension
Désormais, il faut donc 41,5 annuités pour avoir une retraite à taux plein… Enfin, pour le moment, puisqu’il est prévu d’augmenter encore le nombre d’annuités…
Désormais, on ne pourra demander sa retraite qu’à 62 ans, et on n’aura une retraite à taux plein qu’à 67 ans…Taux plein, c’est à dire entre 75 et 80 % du « salaire de référence », qui est calculé différemment selon les cas, mais soyons rassurés, le nivellement va se faire, par le bas, évidemment…
Selon Gérard Filoche : « La moyenne réelle dans la vie réelle d’annuités cotisées par les salariés aujourd’hui en France c’est 36,5 annuités » … En clair, les années qui manquent vont faire baisser le montant des pensions.
Demain en France, ça ne va pas être évident d’avoir une retraite digne de ce nom, à moins de s’appeler mémé Bettencourt…
Déjà, on l’a vu, les plus de 50 ans ne sont plus que 4 sur 10 à travailler…
Du côté des jeunes, ce n’est pas mieux, les petits Tanguy se multiplient, précarité, chômage, entrée tardive sur le marché du travail, stages à répétition, etc…
En 2004 déjà, seulement 86% des homme et 44% des femmes (!) validaient une « carrière complète »… Tout ça ne va pas s’arranger, donc. Conséquence : presque personne ne va pouvoir cotiser 41,5 ans et/ou de travailler jusqu’à 62 ou 67 ans. Ce qui est sûr, en revanche, c’est que cotiser 40 ans ne suffira plus à avoir une bonne pension :
● en 1998, un salarié du privé et un fonctionnaire ayant cotisé 40 ans (carrière complète) pouvaient prétendre à une retraite équivalente à 80% du salaire de référence.
● en 2015, du fait des réformes déjà réalisées, les salariés dans la même situation bénéficieront de pensions bien plus maigres (66,5% du salaire de référence pour un travailleur du privé et 61% pour un fonctionnaire).
Dans ces conditions, le système par répartition a clairement du plomb dans l’aile. Ceux qui pourront vont devoir capitaliser, pour espérer pouvoir vivre correctement une fois à la retraite. Un des objectifs de la réforme est d’ailleurs d’ouvrir tout grand la porte aux assureurs privés et à la retraite par capitalisation. Laurence Parisot, plaidait d’ailleurs en mai, pour la mise en place d’un « nouveau dispositif très incitatif, voire obligatoire, de système de retraite par capitalisation ». Et le magot est de taille : c’est un marché qui pourrait représenter entre 40 à 100 milliards d’euros, de quoi se mettre à l’abri … pour la retraite…
Le Nouvel Obs, Guillaume Sarkozy futur bénéficiaire de la réforme des retraites
Plume de presse, Guillaume Sarkozy fait main basse sur l’argent des retraites complémentaires
Vous avez aimé la réforme des retraites ? Vous allez adorer ce qui suit :
Aujourd’hui, la solidarité nationale fonctionne pour les papis et les mamies qui deviennent dépendants avec l’âge. Ça s’appelle l’APA ou « Allocation personnalisée d’autonomie », tout le monde y a droit, et cela, quel que soit le niveau de revenus… Et ça évite dans bien des cas d’envoyer mémé en maison de retraite. Donc, c’est aussi moins cher pour la collectivité.
Mais c’est encore trop cher pour la bande à Sarko. Le 20 juillet, le Monde annonçait que la commission des affaires sociales de l’Assemblée nationale planchait sur un dispositif d’assurance obligatoire pour les personnes de plus de 50 ans.
Selon le rapport de la députée UMP Valérie Rosso-Debord, ce système se substituerait à l’allocation personnalisée d’autonomie. Clairement, il s’agit d’opposer au principe de solidarité générale, reposant sur un financement public, un dispositif qui s’appuie sur un système d’assurance privée, et tant pis si papi et mamie n’ont que le minimum vieillesse. Ils crèveront dans les mouroirs, on s’en fout, ils font partie de la France de tout en bas.
Autre piste pour faire payer ces salopards de vieux, le rapport propose aussi d’augmenter la contribution sociale généralisée des retraités. Pour le moment, en fonction de son montant, une pension peut être exonérée de CSG ou soumise à un taux de 3,8% ou 6,6% au lieu des 7,5% pour les revenus d’activité. Dans son rapport « Vivre ensemble plus longtemps » (rien que le titre fait marrer) remis le 6 juillet, le « Conseil d’analyse stratégique » souligne « l’injustice » des niches fiscales ainsi consenties aux seniors, invitant à « répartir autrement et de manière plus juste, l’effort fiscal.
Mémé Bettencourt, qui ne paye que 21 % d’impôts, et à qui on « restitue » trente millions d’euros, n’est évidemment pas concernée.
Pour qui vous croyez qu’il travaille, sarkosus minimus, hein ?
Les trois volets de la réforme de l’épargne retraite
Les Echos, la réforme va faire évoluer en profondeur l’épargne privée
Les portes parole de l’UMP causent dans le poste
Ca vient de sortir, le Parlement européen préconise la fin de la retraite par répartition
Sur les retraites, le texte considère que « le financement des pensions ne peut être entièrement laissé au secteur public, mais doit reposer sur des systèmes à trois piliers, comprenant des régimes de retraite publics, professionnels et privés. »
La rapporteure de ce texte est l’eurodéputée « socialiste » française Pervenche Berès…
À gauche, seule la Gauche unitaire européenne, a voté contre.
En voyant le titre, je savais que ce serait signé Gavroche 😉
Très bon article complet et documenté.
Je travaille avec Malakoff-Médéric (caisse retraite complémentaire et prévoyance des assos œuvrant dans le social entre autres) depuis plusieurs années, et en tous cas avant qu’elle soit dirigée par le frangin. Auparavant j’arrivais à obtenir la personne qui s’occupait de nos dossiers et les renseignements ou conseils dont j’avais besoin. Depuis quelques temps c’est le parcours du combattant, interlocuteurs téléphoniques incompétents qui disent qu’une personne nous rappellera mais rien, sauf si c’est pour souscrire un nouveau contrat. Avec une asso dont je m’occupe, on cotise depuis le janvier 2008 à une prévoyance mais on ne verse pas à la bonne caisse (même si les 2 font partie du groupe), personne ne nous a rien dit, ils encaissent mais nous n’avons pas droit aux prestations correspondantes puisqu’on a pas payé au bon endroit.
Bref, le binz.
Je me permets « d’emprunter » à Clo ce petit extrait des « barbouzes » qu’elle a mis sur fessebouc 🙂
alainbu
24 octobre 2010 at 12 h 21 min
Excellent… 😉
« La retraite, faut la prendre jeune »…
« Faut surtout la prendre vivant… »
Aqueu l’accent parigot, c’est encore meilleur…!
Gavroche
24 octobre 2010 at 12 h 39 min
Merci pour cet article bien documenté Gavroche.
Purée… je suis une ponctionnaire qui aura 44 annuités dans les dents (s’il me reste des dents) à 62 ans..mais d’ici là, on sera passé à un âge de départ à 65 ans au bas mot…et le calcul sera abaissé bien sûr…
Quand je vois l’énergie que je mets à faire avancer tous mes zébulon-ne-s et qui me bouffe la santé, je me dis que la reconnaissance de la nation … heu pardon, quelle reconnaissance?
Grumph.
Alors oui la retraite faut la prendre jeune…
mebahel5
24 octobre 2010 at 13 h 16 min
Vraiment l’effet d’un rouleau compresseur…
florence
24 octobre 2010 at 13 h 42 min
ah, gavroche, quand tu es inspirée, ça dépote. j’ai même l’impression d’avoir compris. faudra que je me renseigne un peu mieux sur les retraites « réformées » grecques (« réformer » qui a plusieurs sens, dont celui de « diminuer » !! ça, anne-sophie nous l’a pas faite), je crois que c’est également une horreur. mais bon, ici les gens sont tellement KO debout… tandis que vous, c’est bientôt octobre, et il sera rouge !!
zozefine
24 octobre 2010 at 18 h 21 min
« La France n’a pas besoin de réformes, elle a besoin d’une révolution ».
Gérard Mordillat, dans la préface de la nouvelle édition du Capital.
Putain, c’est vrai que ça devient urgent.
Gavroche
24 octobre 2010 at 18 h 49 min
[…] Pour plus d’infos, voir mon précédent article : ici. […]
Tagada, tagada, voilà les Dalton… « LES VREGENS
20 novembre 2010 at 17 h 27 min